Nous sommes face à ce qui nous semble être, politiquement, une impasse, or je suis convaincu que cela n'est pas et que cette impasse ne vient que de ce que nous n'avons pas, au-devant de nous, les outils conceptuels nous permettant d'envisager d'autres horizons que ceux auxquels nous fûmes antérieurement confrontés.
Or, depuis déjà plusieurs décennies, toutes les sociétés ont évolués et évoluent toujours à un rythme accéléré et elles se transforment sous nos yeux à une vitesse prodigieuse sans que nous n'en ayons pleinement conscience.
De plus, ceci s'est accompagné d'une théorie politico-économique dite néo-libérale, autrement appelée marchéiste qui, mettant la pensée politique au second plan, nous empêche la formulation de nouveaux concepts.
Cette théorie n'est pas d'une grande nouveauté, ses deux siècles d'existance la place, au contraire, dans le prolongement de réflexions pûrement économiques dont les fondements s'ébauchèrent à une époque ou vivaient sur Terre moins d'un milliard d'habitants et, aujourd'hui, avec une population mondiale multipliée par plus de sept, nous sommes au seuil de son achèvement.
Mais il est à remarquer que ce qui fut des trois ordres anciens: le religieux, le guerrier et le marchand, les deux premiers se retrouvent dans les pays européens, sous une forme ou sous une autre, sous le contrôle étatique: l'anglicanisme de Grande-Bretagne sous la férule de la reine, laïcité française, l'impôt religieux allemand,..., pour ce qui est des religions (avec des exceptions telles que la Grèce); les forces armées, quand à elles, sont assujéties, de par leurs fonctions régaliennes, à l'état montrent la nécessité des gouvernements de maîtriser ces vieux ordres.
Cela se fit, dans l'histoire avec beaucoup de difficultés, des avancées et des reculs
Il n'est, donc, que les puissances financières qui échapent encore à la régulation des nations.
C'est, je le pense, la cause majeur des difficultés devant lesquelles nous sommes: n'avoir pour seule horizon d'une pensée politique et de la chose publique que des considérations de l'ordre de l'économisme et du monétarisme arc-bouté sur une philosophie sociale purement individualiste (pensée archaïque totalement différente et opposée de ce que peut être l'individualité) en mésestimant ce que peut-être l'organisation et la régulation, les équilibres des pouvoirs, la recherche de la justesse des prises de décisions, les avis contraires, le symbolisme, l'histoire et la géographie,..., toutes ces dimensions pénétrant les sociétés, d'autant plus quand leur complexité atteint, comme en Occident (Japon compris) ou dans les pays émergeants un certain seuil nécessitant une démocratie représentative.
Ce pouvoir, dit néo-libéral ou marchéiste, d'essence oligarchique de type ploutocratique et de genre ubuesque semi-totalitaire perd progressivement de ce qui fait la force et la durée de tout pouvoir, son intelligence et son esprit de création: soit par le rejet de ses éléments les plus contradicteurs donc ceux qui sont intellectuellement les plus vigoureux, indépendants et inventifs, soit par l'éloignement décidé et délibéré de ceux-ci pour divers raisons.
Nous sommes dans ce moment où ces forces gangréneuses ne sont plus dans la capacité de leur propre survie, mais entre temps elles aurons destabilisé l'ensemble des sociétés et, tant qu'elles tiennent encore, et la survivance du dollar en est l'étalon, nous pouvons considérer deux choses: la première est une déstabilisation accrue des sociétés, la seconde que nous ne sommes pas encore dedant l'immense cataclysme accompagnant cet effondrement, la question n'étant pas de savoir si il aura lieu mais quand.
Or, quand cela aura lieu, l'ensemble des vieilles forces inconscientes, parce que misent sous le boisseau, rejailliront au grand jour chez tous les peuples et, parce que le politique reprendra ses droits, les jeux de force à l'intérieur des pays et entre les états, la géopolitique, l'inconscient des peuples, les contradictions entre traditions, conservatismes et la modernité, les frustrations... pourrons facilement se muter en agressivité, parfois la plus extrême.
N'oublions jamais cet étrange attraction des peuples pour leur inconscient social. Étrange parce que les peuples sont attirés, aspirés par cet inconscient en en ayant véritablement ni le désir, ni l'envie et sans même que cet inconscient s'exprimât jamais d'une semblable manière.
Tout compte fait, le véritable danger, de tout temps, fut et reste la passion des hommes, elle peut-être constructive et bâtisseuse en un éros fabuleux, flamboyant ou, quand elle s'est tournée vers le sombre regard des pulsions destructrices, peut devenir un thanatos grimassant.
Il est, à mon sens, totalement inutile de considérer la perversité du néo-libéralisme ni même son effondrement, tout simplement parce que ce n'est que s'encombrer l'esprit d'évidence puisque cet évènement aura lieu, quelque soit la façon que cela se fera. En revanche il est d'une extraordinaire urgence de songer l'instant de cet effondrement et de sa suite dans le court terme, de s'y préparer, non pas en individualiste, avatar désuet et morbide du marchéisme, ni en un réflexe purement collectif, réaction primitive et dangereuse qui ne viendrait qu'en réaction de la tentative d'effacement de la notion même de peuple mais dans une action dont le socle serait l'individualité, c'est-à-dire la compréhension conscience de sa propre existence et de celle de l'autre, de la conscience en son inconscient mise en corrélation avec l'existence propre et distinct de chaque autre être humain, de son respect, ainsi que de la compréhension et du respect de la vie en société (compréhension et respect voulant dire, aussi, souplesse et égratignement des dits respects de l'autre et la vie en société). Cela ne retire en rien la nécessité absolue que chacun d'entre nous, ainsi que les sociétés ont de se défendre.
Des questions telles que qu'est-ce que la démocratie, qu'est-ce que notre modernité, qu'est-ce que la propriété, à qui appartient véritablement une usine, une liasse de billets, un sol, le ciel, une molécule, une idée, une oeuvre, un homme, une femme, un enfant, un chien, une touffe de cheveux, quel taux de perméabilité pour les frontières, quel est le minimum de savoir que doit avoir acquis chaque enfant, quelle est la place du citoyen dans la société, la place du religieux, la place du bandit, du gendarme, du politique, la place du savant, de l'ignorant, du différent, du géni et du crétin,...,etc,...? Toutes ces questions et une myriade d'autres, tant d'autres, ne doivent plus être dans l'obscurité de notre peur du savoir et du comprendre, de son rejet, mais jaillir, rejaillir au grand jour en une force irrésistible.
Parce que, en fin de compte, le néo-libéraliste, l'individualisme sont, pour l'essentiel, que pures pensées obscurantistes, que purs obscurantismes d'où ego et narcissisme, ces deux frères jumeaux, puisent leurs puissances.
C'est la raison pour laquelle j'appelle à une nouvelle renaissance!
THEURIC