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  • Fiction 5) La veille de Noël

     

    Leurs petits-enfants venaient de se coucher.

    Le couple, assit dans le profond canapé faisant face à l'âtre qui, de temps en temps, laissait échapper, dans un léger claquement, une étincelle montant fugacement par la cheminée, sirotait un alcool de prune dans la semi-pénombre de la pièce.

    Une lampe à pétrole, posée sur la table basse devant eux, rajoutait une faible lumière supplémentaire au feu qui brulait devant leurs yeux contemplatifs.

    A leur droite, un sapin de noël, joliment décoré avec, à ses pieds, une profusion de cadeaux, attendait le retour du courant pour recommencer à clignoter.

    La couverture épaisse, les recouvrant tous deux, suffisait à peine à les réchauffer.

    Au-dehors, une neige lourde et froide tombait sans discontinuer depuis le matin, s'accumulant, au sol, de décimètre en décimètre, cette intempérie recouvrait progressivement l'ensemble de l'Europe, faisant suite et radoucissant un gel sévère et persistant

    Ce fut dans l'heure précédente qu'il y eut la panne d'électricité.

    La femme reposait sa tête sur l'épaule de son compagnon et, lui, caressait ses cheveux l'air songeur.

    Le sentant soucieux, elle se tourna vers lui :

    « Tu n'as pas à te tourmenter, » dit-elle, « tu fera au mieux...

    -Sais-tu pourquoi la première ministre m'a voulu dans son gouvernement ?

    -Non, j'imagine pour tes qualités. » Dit-elle en se tournant vers lui.

    « Pour la gifle que j'ai donné à Albert, le camarade socialiste Albert, » dit-il d'une pointe ironie, « lors de notre dernière rencontre.

    -Je me souviens de cela, c'était il y a deux semaines, avant le changement de premier ministre, vous discutiez d'économie et lui te parlait de la loi des marchés.

    -Ça m'a mis hors de moi, la loi des marchés, l'imbécile, c'est à cause de cette loi fumeuse que nous sommes dans cette situation et ce crétin vient nous bassiner avec cette foutaise, et dire que j'y ai cru, moi aussi. Tu sais que ça s'était passé devant les caméras, je croyais ma carrière foutue, tu te souviens ?

    -Ô oui, tu t'en es joliment lamenté. » Elle lui serra la main tendrement.

    -Martine...

    -Tiens, tu l'appelle Martine.

    -C'est elle qui nous l'a demandé, tu es jalouse, toi, maintenant ?

    -Non, je te taquine, vas-y, continue.

    -Oui, donc, Martine, notre premier ministre, m'a montré le résultat du sondage qu'elle a fait faire sur ce sujet, j'obtiens, avec cette gifle, une superbe notoriété et une belle cote de popularité...

    -J'ai vu ça à la télé, un sociologue a expliqué que c'était comme si tout le monde s'était défoulé à travers toi, le film de cette baffe est regardé par un nombre impressionnant de personnes sur le web, ça fait un terrible B.R. m'a dit Germain, ton petit-fils.

    -Qu'est-ce donc qu'un B.R. ?

    -Un bourdonnement de ruche en remplacement de buzz, depuis l'effondrement des U.S.A. Les mots anglais n'ont plus la cote et disparaissent. J'espère que ce n'est pas pour ça que t'es devenu ministre ?

    -Je ne le pense pas, mais cette notoriété ne risque pas de durer bien longtemps, tu sais que nous allons établir des bons de rationnement ? »

    Sa compagne se redressa tout à fait et le scruta intensément :

    « C'est une blague ?

    -Non, nous manquons de tout, sauf d'uranium, nous en avons une réserve pour trois ans, heureusement pour nos centrales, mais les autres pays européens commence à manquer de fioul pour les leurs de centrales et puis tu connais comme moi la pénurie d'essence, de gasoil et de tous les dérivés pétroliers que nous avons en ce moment, et si il n'y avait que cela, nous n'avons plus assez de stocke en quoi que ce soit, pas assez de nourriture, de métaux, de terres rares, de pièces détachées pour tout et n'importe quoi, plus de téléviseurs, enfin, pas assez, presque pas d'automobile en vente, plus d'ordinateur, tu te rends compte que dans mon ministère nos machines informatiques sont à bout de souffle et doivent être remplacées, mon premier travail à consisté à envoyer des gents de mon personnel dans des casses informatiques pour y trouver des pièces de rechange.

    -C'est à ce point là ?

    -C'est pire. Nous n'avons plus assez de personnel qualifié pour réparer ou mettre en marche les machines, quand l'usine existe encore, les usines ont quasiment toutes disparue d'Europe,sauf dans les anciens pays de l'est, mais eux ne veulent rien savoir pour partager le peu qu'ils ont, même l'Allemagne est en pénurie, pour tout dire, le gouvernement vient de nommer, en urgence, une équipe d'ingénieurs, de techniciens et d'architectes pour que nous puissions rebâtir un tissu industriel mais cela prendra du temps...

    -Mais je ne comprends pas, comment cela se fait-il que nous soyons dans un tel dénuement, il y a peu de temps encore nous croulions sous les excédents et maintenant, en quoi, moins d'un mois, nous nous retrouvons dans cette indigence, pourrais-tu m'expliquer ?

    -Il y a quatre facteurs...

    -Là, tu fais ton énarque !

    -Comment veux-tu que je te l'explique autrement ?

    -Bien, alors, vas-y, je t'écoute.

    -Ces quatre facteurs sont, primo, » dit-il en énumérant sur ses doigts en ayant sorti ses mains de la couverture, « la nationalisation des industries occidentales par la Chine, l'Inde, le Brésil et d'autres venant de l'effondrement économique de tous ces pays après celui du dollar et de l'euro, raison de notre bientôt retour au franc, deuzio, la mobilisation militaire progressive des deux géants asiatiques qui leur nécessite la réquisition de plus en plus importante de leurs ressources, ressources qu'ils nous vendent à un coût de plus en plus élevé, tertio, ces mêmes pays payent au prix fort les matières premières dont nous aurions besoin, pour l'énergie, par exemple, et nous, nous ne pouvons pas suivre, quarto, depuis la ruine de l'économie globale les transports aériens et maritimes sont en progressive déliquescence, cela dû à la raréfaction des échanges commerciaux et du tourisme, je ne connais pas le chiffre mais le nombre de transporteurs qui disparaissent est ahurissant, et ceux qui survivent le font grâce aux chinois et aux indiens. Sais-tu pourquoi nous avons régulièrement ces pannes de courant depuis le début de l’hiver, et ce n'est pas seulement une panne de secteur?

    -Non.

    -Le délestage, seuls les grands centres urbains sont privilégiés, partout en Europe, alors tu peux te dire que notre petit patelin ne peut que passer qu'au second plan. »

    Un profond et court silence s'établit, ils terminèrent leur verre et le posèrent sur la table puis le téléphone cellulaire de l'homme sonna, il décrocha :

    « Allo,..., oui,..., bien, je vous attendrais donc pour treize heure. » Il raccrocha. « Un véhicule militaire viendra me chercher demain, avec cette neige il n'y a que ce type de véhicule qui peut circuler, » dit-il, « je vais juste avoir le temps d'ouvrir les cadeaux avec les petits et manger avec vous demain midi, après, je file à Matignon où aura lieu une réunion interministèrielle je ne pense pas que nous puissions nous voir avant quelque temps ou alors viens me rejoindre à Paris.

    -Je ne sais pas, je verrais. Je sens que je vais seule m'occuper des bambins pour les jours qui viennent du fait que Constantin et Gabrielle sont bloqués par ce mauvais temps.

    -Ne dis pas que ce n'est pas pour te déplaire.

    -C'est vrai, je crois que nous allons bien nous amuser, tous les trois. Le feu s’éteint, je te propose que nous allions nous coucher, et puis il n'est pas bien tard et un petit câlin serait plutôt bien venu, cela nous réchauffera, le lit doit être glacial. »

    Ils s'embrassèrent tendrement puis se levèrent, lui, tenant la couverture.


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  • Fiction 4) Se livrer

     

     

    Perdu au milieu de l'océan, le chapelet de petits îlots, minuscule paradis offshore, se révélait bien trop exigu pour la venue de tous ces fortunés fuyant, qui la justice de leur pays, qui les différentes maffias qui avaient mis leur têtes à prix quand ce n'était ceux poursuivis par des juges comme par des criminels.

    Il avait fallu y bâtir à la hâte commerces, restaurants et lieux de plaisir pour accueillir, comme il se devait, tout ce beau monde richissime qui, parce que toutes les monnaies du monde ne valaient plus rien, se devaient de payer en or la moindre des consommations.

    A la terrasse d'un café deux hommes, l'un jeune, l'autre vieux, devisaient tranquillement en buvant une boisson joliment apprêtée. Le plus âgé dit:

    "Demain je prends l'avion et rentre en France, j'emporte avec moi tout ce qui me reste de l'or que j'avais ramené ici, enfin je n'en ai pas dépensé grand chose, puis je vais me constituer prisonnier!

    -Tu es complètement fou, » dit le puiné, véhément, « à quoi cela va-t-il te servir d'aller en prison quand ici on se la coule douce au soleil, tous les soir j'ai une nouvelle femme dans mon lit, n'attends pas de moi que je te suive dans ce délire, j'y suis, j'y reste, et puis ce n'est pas à un juge de dire si mon argent est ou pas licite, je l'ai bien gagné, et par mon travail, encore!

    -Quel travail, au bureau tu n'étais pas le plus ardent à la tâche, loin de là, tu sais comment on te surnommait ? Poil aux mains ! Sans compter tes détournements de fonds à n'en plus finir, la paye et les primes pourtant conséquents que je te versais n'avait pas l'air de te suffire, mais bon, pour ça, ne t'en fais pas, j'ai fait la même chose, parfois même légalement en jouant avec les lois, c'est pourquoi, à l'époque, je n'avais rien dit.

    -Et alors, de quoi te plains-tu? Tout le monde fermait les yeux, si tu savais le nombre de politiciens qui faisaient la queue pour que je leur serve du fric pour leurs élections, j'ai les noms, là, dans un carnet! » Dit-il en remuant un petit calepin au-dessus de sa tête.

    « Combien de noms dans ce carnet? dix?

    -onze.

    -Tu vois, il n'était pas besoin d'acheter grand monde, il n'était même pas besoin d'acheter qui que ce soit, tu as dépensé de l'argent inutilement, le simple attrait d'une doctrine en vogue et facile à comprendre, même si elle est stupide, suffit pour qu'elle soit adoptée par une majorité des élites politique, surtout qu'elles ne savaient plus, dans les années 90, après la chute de l'U.R.S.S., à quel saint se vouer, le réflexe d'obéissance et la crainte de se confronter à une puissance dangereuse, c'est à dire nous, suffisait pour faire taire les récalcitrants, ça a été pareil pour les journalistes, beaucoup de professeurs en économie et de bien d'autres professionnels de cette sortes. Ce qui nous a plombé c'est notre avarice et de croire qu'il nous serait possible de manipuler les peuples ad vitam aeternam. Nous avons vidé les caisses, toutes les caisses et quand il n'y a plus rien eu à soutirer nous fument évidemment chassé.

    -Par une bande de communistes qui veulent que la société soit égalitaire, l'égalité, ça n'existe pas dans une société, il y a et il y aura toujours des élites pour diriger la plèbe...

    -Crois-tu vraiment que les policiers ou les militaires soient communistes ? » Dit l'ancien en remuant la tête, « Il y a bien quelques exceptions par ci par là mais je ne pense pas qu'ils le soient dans leur immense majorité, de toute façon ce sont les hommes politiques qui nous ont fait partir, tous partis confondus, de droite comme de gauche et je suis sûr que parmi ceux qui ont tenu les discours les plus dures contre nous s'en trouve beaucoup à qui tu as versé quelques prébendes...

    -Des traites...

    -Détrompes-toi, ils font juste de la politique, quand nous nous retrouvâmes à ne plus rien représenter et à ne plus montrer le moindre danger ils ont retourné leur veste, à partir du moment où les français, les européens, enfin tout le monde, quoi, même les militaires et les policiers ont commencé à défiler dans les rues, le pouvoir en place ne pouvait plus faire autrement que de nous mettre en prison et même le banquier le plus honnête a eu des problème avec la justice, pense à Maurice...

    -Ô, lui, il n'avait que le mot vertu et probité à la bouche, » dit-il avec une moue de dédain au coin de la lèvre « la dernière fois que je suis allé chez lui il m'ont bassiné, lui et sa femme, avec leur morale à deux balles, ils me disaient que nous courrions à la catastrophe, que nous ne devions pas mettre au chômage les petites gents, et blablabla, et blablabla, j'en avais eu tellement marre que je ne suis jamais revenu chez lui, ça doit bien faire cinq ans que je ne l'ai pas revu.

    -Comme quoi il n'avait pas tord ! Sais-tu que maintenant, après avoir été blanchi par la justice, il a été nommé comme gestionnaire de notre groupe ?

    -C'est ce que disais, tous des traites !

    -La différence entre toi et moi c'est que toi tu es sincère, imbécile mais sincère, quand à moi j'ai joué, à un immense casino, certes, mais ce n'était que du jeu. Les notions comme celles de responsabilités te sont parfaitement étrangères et même quand ton père s'est retrouvé devant la justice pour concussion tu n'a pas levé le moindre petit doigt pour lui, rassure toi, lui aurait fait la même chose pour toi, c'est à dire rien, tu sais, quand je l'ai connu tu n'étais même pas né. Connais-tu la différence entre immoralité et amoralité ?

    -Non, et franchement je me moque de ces petites subtilités.

    -Et bien je vais tout de même t'en instruire : l'immoralité c'est de connaître ce qui est bien de faire ou de ne pas faire dans la société et d'agir soit à l'opposée, soit à la marge, de faire ce qui est contraire ou différent de ce que commande la moral et par extension les interdits mais d'en connaître le sens, en fait il faut une certaine dose d'immoralité aux génies, artistes, scientifiques ou autres pour pouvoir inventer, quand à l'amoralité, elle, se définit de ne pas avoir la moindre idée de ce que peut-être une moral, d'avoir une structure psychique telle que la notion même d'interdit lui est étranger, l'amoral, l'être amoral est lui dans la quasi impossibilité d'avoir une idée originale et est souvent le pire des conservateurs et des réactionnaires. Certain, même, sont des tueurs en série psychopathes.

    -Et ça nous mène à quoi tout ça ?

    -Ça nous mène à ce que je te dise que si moi je suis immoral et ais su m'amuser à plumer le plus grand nombre possible de gent comme un joueur de poker professionnel plume un joueur débutant, je savais toujours que ce que je faisais n'était ni probe, ni honnête, toi, qui es par nature amoral, ne peux savoir ce que peuvent bien être probité et honnêteté. Ta fortune tu ne la doit que par la crainte que tu inspirais, ton naturel rusé et roué et ta naissance mais ni par ton intelligence, ni par ton esprit d'entreprise. Tiens, regarde, je t'insulte et tu ne réagis même pas! Que je te dise tout de même pourquoi je parts d'ici et rentre en France : tous autant que nous sommes, » et il fit un large arc de cercle de son bras dans la direction de la rue noir de monde, « vu que nous avons ruiné tout le monde, nous sommes poursuivit autant par des mandats d'amener internationaux que par des tueurs à gages à la solde des cartels et des maffias, certains de ces tueurs, tiens, regarde cette personne, là, à ta droite, » son vis-à vis tourna discrètement la tête, « n'hésiterons pas à faire même exploser, ici, quelques bombes pour tuer un grand nombre de ces cibles et avoir la prime la plus importante possible, je préfère, quand à moi, rentrer en France avec une belle monnaie d'échange, mon or, qui soit dit en passant est déjà arrivée là-bas, et vu que j'ai évité le plus gros de la tempête et les premières condamnations expiatoires, avoir une peine de prison légère et vivre, même chichement et discrètement, de mes rentes, dans un coin reculé et surtout de rester en vie, mieux vaut cela que de crever bêtement à cause d'une balle ou d'un explosif.

    -J'ai assez entendu d'âneries comme ça, » dit le plus jeune en se levant, agassé « Salut et bonne chance dans les prisons françaises ! »

    Il partit. L'ancien paya les consommations de quelques piécettes d'or en haussant les épaules, se leva, se dirigea vers l'hôtel préparer sa valise. Quand très tôt le matin son avion décolla une bombe puissante explosa dans la boite de nuit où le plus jeune, justement, dansait.


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  • Fiction 2) Retrait des troupes

     

    Le premier attendit la fin des discutions pour s'éclipser discrètement de la réunion, le second le suivit quelques minutes plus tard quand tout le monde se fut agglutiner autour de la collation traditionnelle, en entrant dans la pièce il dit :


    « Que penses-tu de la proposition américaine, Otto ? »


    Les deux ministres des affaires étrangères, allemand et français, se retrouvaient dans l'un de ces bureaux impersonnels comme seuls peuvent l'être ceux, à Bruxelles, aménagés pour les ministres du Conseil de l'Union Européenne.


    Il y avait là un mélange de mauvais goût et d'inconfort qui touchait au génie, des fauteuils à la table basse, de la couleur des peintures murales aux photos qui y étaient apposées, cela y transpirait, à l'identique, les plus impersonnels installations des administrations provinciales des pays de l'union, jusqu'aux tasses à café octogonales, incommodes, qui, à chaque instant, pouvaient laisser échapper un peu de breuvage sur la chemise du plus attentif.


    Tous deux, monsieur Otto Stücberg, le ministre allemand comme monsieur Pierre Verneuille, le ministre français se connaissaient depuis les universités et les grandes écoles qu'ils avaient suivi ensemble dans les deux pays, ils avaient, dès le début, sympathisé et quand bien même leur vie professionnel les avaient éloigné, le premier comme professeur d'académie et le second au sein d'un parti politique, ils avaient continué de garder continuellement contacte, ce n'est qu'aux dernières élections qu'ils se retrouvèrent être en charge du même ministère de leur patrie respective.


    Polyglottes, ils passaient, sans distinction, d'une langue à une autre, allemand, français, anglais voire italien et s'amusaient, parfois, à quelques échanges en latin, hindi ou mandarin.


    Le ministre allemand réfléchissait un instant en touillant lentement son café de sa petite cuillère, l'air absent. Son alter égo le laissait à sa méditation, le connaissant, il savait combien étaient profonds ses moments de réflexions.


    « Je ne vois pas comment nous pourrions faire autrement que de l'accepter, » repris le ministre allemand, « nous devons montrer que l'Europe ne laisse tomber aucun de ses alliés, fût-il ruiné, et de plus cela nous permettra d'incorporer à bon compte deux portes-avions et autres navires à nos marines, notre principal souci étant que nombre de pays de l'Union-Européenne ne verrons pas d'un très bon œil qu'un pays ou un autre, évidemment les nôtres, renforce ainsi sa flotte, nous devrions en profiter pour jeter les bases d'une marine européenne.


    -J'en suis venu à la même conclusion bien que je reste encore perplexe. »répondit le ministre français « En as-tu prévenu ton gouvernement ? Personnellement je ne l'ai pas encore fait, j'attendais d'en discuter avec toi, surtout que la façon avec laquelle nous fûmes contacté... il me semble que ce le fut pour toi de la même manière que pour moi, sur ton portable, et la personnalité qui le fît me laisse songeur, un général de l'U.S. Navy sans grande envergure...,


    -Le général Géronimo, cela ne s'invente pas, j'avais reçu plusieurs notes m'avisant que l'armée américaine recrute, depuis quelques temps, beaucoup d'amérindiens, ils en deviendraient même quasiment majoritaire et, ce, dans les trois armées. Ceci explique peut-être cela. Mais bon, échanger des navires à la pointe de la technologie contre le rapatriement des troupes bloquées en Irak et en Afghanistan, quand bien même ce rapatriement coûterait extrêmement cher, ce sera moins coûteux que de fabriquer de tels vaisseaux nous-même, ce coût ne sera pas facile à faire avaler à nos chefs d'état et ministres de l'économie, sans parler de monsieur Sanchez, président de la commission européenne et de monsieur matelli, celui de la banque centrale, tous deux quelque peu pingres et toujours néolibéraux.


    -Bof, ces deux là se laisserons faire après quelques pressions, ils ne sont animé ni par le courage ni par la subtilité, notre problème consiste à convaincre mon président et ton chancelier, et même si l'échange navires contre rapatriement se fait à notre avantage, n'est pas sûr qu'ils en soient d'accord, sinon j'en ai déjà parlé à mon confrère de la défense qui semble me suivre, ne te parraît-il pas proche du tiens ?...


    -Si, ils sont tous deux militaires et se comprennent, je le contacterais tout à l'heure, il va nous falloir trouver des alliés dans nos gouvernements, j'en connais quelques uns qui nous aiderons...


    -J'ai aussi des noms à l'esprit, je vais envoyer de mes conseillers faire des approches. Mais notre autre souci consiste à savoir si c'est bien le gouvernement américain qui conduit cette transaction ou si c'est le fait d'une action isolée, pour cela tu connais aussi bien que moi la situation, nous ne parvenons plus à contacter qui que ce soit à la maison-blanche si ce n'est quelques administratifs de second ordre, leur président et vice-président a comme disparu, je n'arrive même plus à joindre l'ambassade américaine à Paris...


    -j'ai toujours, quand à moi, un contacte à Berlin, heureusement que chez nous ce ne sont que les banquiers qui se sont éclipsés, mon collègue de la justice avait, en arrivant ici, une mallette remplie de mandas d'arrêt internationaux.


    -Le mien aussi, je les ai tous vu s'échanger leurs foutu mandas, « je te de donne ceux-ci, tu me prends ceux-là », c'était assez comique à voir. »


    Tous deux de rire.


    Pierre Verneuille repris :


    « De toute façon, nous ne pouvons pas faire grand chose sans avoir prévenu tout le monde, nos gouvernements, nos confrères, je crois que nous n'allons pas beaucoup dormir la semaine prochaine.
    -A qui le dis-tu, moi qui sors à peine d'une élection, une dernière chose, je te propose de garder tout cela sous silence, évite de parler aux journalistes, je te connais.


    -Comme si je n’arrêtais pas de blablater, et sinon, comment va Éva ?


    -Comme un charme, quand elle a appris que je venais ici elle m'a demandé de t'embrasser pour elle, au fait, c'est vrai que t'es grand-père ?


    -Oui, depuis trois jours, j'ai juste eu le temps de passer voir ma fille et son enfant, un petit Fabien, avant de venir, ils vont bien, c'est le père qui est le plus tourneboulé, je ne sais pas ce qu'elle lui trouve.


    -Ah, les pères et leur fille, toujours la même rengaine! » dit-il en avalant d'un trait son café devenu froid, puis il posa sa tasse sur la table, ils se levèrent ensemble, déjà leur téléphone en main, et sortirent l'un après l'autre avec aussi, à l'esprit, une communication urgente à faire aux autres ministres heureusement toujours en salle de réunion.

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  • Fiction 1) La ruine

     

    « Quand pars-tu ?

    -Dans trente minutes je vais à l'aéroport et l'avion décollera à six heure, ce soir ce sera le dernier, après l'aéroport sera fermé.

    -J'en ai parlé avec le général Black, il va y faire son cantonnement et nous utiliserons les surfaces restantes pour des cultures après avoir dépolluer le site.

    -Bonne idée. »

    Les deux hommes, chacun un grand mug à la main remplit d'un liquide chaud se voulant café, se tenaient face à face, assis dans un petit laboratoire de l'université encombré de matériels épars en plus ou moins bon état. La fatigue se lisait sur les visages.

    « Merci, Alexandre, pour l'escorte.

    -Non, c'est moi, Albert, qui te remercie, c'est nous tous qui te remercions, sans toi je ne sais pas ce que nous aurions fait et puis c'est le général qui nous a confié ces hommes. Plus aucune route n'est sûre, des militaires armés sont aujourd'hui le seul passe-port efficace. Je suis épuisé, ça fait six mois que je ne dors pas suffisamment », dit-il se frottant les yeux.

    « Comme nous tous, tu te rends compte du travail que nous avons accomplit, en six mois, après l'effondrement du dollar.

    -C'est vrai, et revenir à des techniques anciennes pour que nous puissions vivre en autarcie était de toi, il nous a fallu trouver à la bibliothèque les livres traitant de ces vieilles technologies, retrouver les gestes anciens, regardes mes mains, elles sont caleuses comme jamais...

    -Oh, les miennes n'ont pas bonne mine non plus, regarde » dit-il en lui montrant ses paumes abimées par les travaux physiques, « d'un autre coté ça a fait fondre toute ma graisse, je ne peux plus mettre mes pantalons, ils sont beaucoup trop large, au moins à quelque chose malheur est bon, j'ai retrouvé ma forme.

    -La même chose pour moi, j'ai l'impression de flotter dans mes chemises. Au fait, tu sais combien nous sommes de professeurs restant à l'université, j'ai fait le compte hier, nous ne sommes plus qu'une vingtaine, les autres sont parti progressivement.

    -J'espère que je serais le dernier, tu te souviens de Bob ? Il est parti le premier en même temps que Margarette, il y a cinq mois, il faut dire qu'en cette période les rues n'étaient déjà plus sûr et elle avait peur pour les enfants.

    -Elle a eu raison de partir, en France je crois ? Où travaille-t-elle ?

    -Comme elle est française, elle a pu trouver, en peu de temps, un bon poste dans une université de Bordeaux ainsi qu'un logement, elle m'en a aussi réservé un dans la même faculté, mais nous avons de plus en plus de mal pour nous joindre, le téléphone comme internet fonctionne de moins en moins bien, elle s'inquiète pour moi...

    -Je la comprends, comme tout le reste, ce n'est même plus la peine d'écrire une lettre, la poste ne marche plus. J'ai réussi à joindre le professeur liethmann au téléphone, ça n'a duré que vingt secondes, j'ai fini par le joindre par notre radio onde-courte, il va bien, lui et son équipe ont sécurisé leur centrale nucléaire.

    -Voilà un problème en moins. »

    Un long silence s'établit entre les deux hommes, aucun n'osant croiser le regard de l'autre, sur un mur un grand tableau noir était recouvert d'équations à moitié effacées comme les dernières traces d'une ère finissante.

    Albert repris :

    « Cela m'ennuie de vous lâcher comme ça...

    -Tu as fait ta part, Albert... »

    Le silence retomba, un silence triste, lourd de regret, de fatigue et d'amertume.

    « Ta fabrique de tuile et de brique en torchis fonctionne à plein régime, nous allons pouvoir bâtir des logements et des fermes hydroponiques, tu te représente, devoir revenir au torchis, ici, aux U.S.A., au vingt et unième siècle...

    -Que veux-tu, le pays est ruiné, je t'ai laissé quelques idées dans ce dossier, là... », il désignât une chaise juste à l'entrée de la pièce où, il y peu, en entrant, il y avait déposé le classeur, « j'y ai jeté toutes sortes d'idées de culture et d'élevage hors sol, tiens, j'y ai mis aussi une ébauche de billet de banque ainsi que deux élèves en art plastique excellents graveurs que je te conseille, et puis tout un tas d'autre choses...

    -Je te fais confiance, tu as dû y travailler toute la nuit, non ?

    -Oui, tu y trouveras également quelques vues pour une conscription de tes étudiants et des jeunes de la ville qui le souhaitent, j'y propose service militaire contre études gratuite.

    -J'étudierais tout ça plus tard mais je crois qu'il va falloir que tu partes.

    -En effet. »

    Tous deux se levèrent et se serrèrent la main sans mot dire, Albert sortit puis monta dans le 4x4 d'où l'attendaient quatre soldats solidement armés.

    Au moment où le véhicule démarrait, Albert cria à l'adresse de son ami :

    « N'oublie pas de cultiver du tabac, fais tes cigarettes, il te faut éviter à tout prix les commerces prohibés. »

    Puis le véhicule fonça vers l'aéroport.

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